Ce livre se rattache au précédent parce que Plotin y traite encore de la matière, qu’il considère comme la puissance de devenir toutes choses.
(§ I) Quand on dit qn’une chose est en puissance, c’est parce qu’elle peut devenir autre que ce qu’elle est : c’est ainsi, par exemple, qne l’airain est en puissance une statue. — Être en puissance n’est pas d’ailleurs la même chose qu’être en puissance, si l’on entend la puissance productrice. La puissance est opposée à l’acte, être en puissance à être en acte. La chose qui est ainsi en puissance est le sujet des modifications passives, des formes et des caractères spécifiques, c’est-à-dire la matière.
(II) Ce qui est en puissance étant la matière, ce qui est en acte est la forme. Une substance corporelle, comme l’airain, ne peut être à la fois en puissance et en acte une autre chose, par exemple une statue. Une substance incorporelle, comme l’âme, peut être à la fois en puissance et en acte une autre chose, par exemple le grammairien.
On donne souvent le nom d’acte à la forme de tel ou tel objet. Ce nom conviendrait mieux à l’acte qui n’est pas la forme de tel ou tel objet, à l’acte correspondant à la puissance qui amène une chose à l’acte.
Quant à la puissance qui produit par elle-même ce dont elle est la puissance, elle est une habitude.
(III) Si l’on applique au monde intelligible les considérations précédentes, on voit, en examinant l’intelligence et l’âme, que tout intelligible est en acte et est acte.
(IV-V) Dans le monde sensible, au contraire, ce qui est une chose en puissance est une autre chose en acte. Quant à la matière, elle est en puissance tous les êtres et elle n’est aucun d’eux en acte ; on l’appelle l’informe par opposition à la forme, le non-être par opposition à l’être, dont elle n’est qu’une faible et obscure image. L’être de la matière est ce qui doit être, ce qui sera, la puissance de devenir toutes choses.