Cousin: Eryxias 392a-393a — Prólogo

Nous étions en train de nous promener sous le portique de Zeus Libérateur, Eryxias de Steiria et moi, quand vinrent à nous Critias et Erasistratos le neveu de Phéax, fils d’Erasistratos. Ce dernier était rentré tout récemment de Sicile et de ces régions.

« Salut, Socrate », dit-il, en nous abordant. — « Salut à toi pareillement », répondis-je. « Et alors ? Nous rapportes-tu quelque bonne nouvelle de Sicile? » « Mais tout à fait. Voulez-vous, continua-t-il, que nous nous asseyons d’abord ? car je suis fatigué d’avoir fait la route à pied depuis Mégare ».

— « Volontiers, si cela te fait plaisir ».

— « Eh bien ! que voulez-vous savoir en premier lieu des gens de là-bas ? Ce qu’ils font ou quels sentiments ils ont à l’égard de notre ville ? Leur humeur envers nous me fait tout à fait penser aux guêpes : si, en effet, on les excite un tant soit peu et si on les irrite, on n’en peut venir à bout, à moins de s’attaquer à l’essaim et de le détruire complètement. Ainsi des gens de Syracuse. Si on ne se donne la peine d’armer une flotte puissante pour aller là-bas, il n’y aura pas moyen de soumettre cette ville ; de petites expéditions ne feraient que les irriter davantage et les rendraient souverainement insupportables. Ils viennent de nous envoyer des ambassadeurs, mais je crois bien que c’est pour tendre quelque embûche à notre cité ».

Tandis que nous causions, voici que les ambassadeurs passèrent. Alors, Erasistratos me montrant l’un d’entre eux, me dit : « Tiens, celui-là, Socrate, c’est le plus riche des Siciliens et des Italiens. Comment ne le serait-il pas, poursuivit-il, lui qui possède une telle étendue de terrain qu’il lui serait facile, s’il voulait, de faire des labours d’une étendue immense ! On n’en trouverait certainement pas une pareille dans toute la Grèce. De plus, ses autres richesses sont considérables, esclaves, chevaux, or, argent… » Comme je le voyais lancé à pérorer sur la fortune de cet homme, je lui demandai : « Eh bien ! Erasistratos, pour quelle sorte d’homme passe-t-il en Sicile? » — « Lui, dit-il, il passe pour le plus scélérat des Siciliens et des Italiens, et il l’est plus que tous, d’autant plus scélérat qu’il est plus riche. Aussi, demande à n’importe quel Sicilien quel homme, à son avis, est le plus scélérat et le plus riche, personne ne t’en désignera un autre que lui ».

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