Bouillet Enéada VI, 7, 3 — As formas não são o objeto de um raciocínio

3. Mais, dira-t-on, pourquoi l’Intelligence n’aurait-elle pu délibérer avant de produire l’homme sensible ? — L’homme sensible est conforme à l’homme intelligible; on ne peut rien lui ajouter, rien lui retrancher. Si l’on admet que l’Intelligence délibère et raisonne, c’est une simple supposition. Quand on suppose que les choses ont été créées, on est conduit à admettre qu’il y a eu délibéra?ion et raisonnement; mais il faut renoncer à cette opinion du moment qu’il est démontré que les choses sont engendrées éternellement: car ce qui est de tout temps ne peut être l’objet d’une délibération. Pour que l’Intelligence délibérât, il faudrait qu’elle eût oublié la marche qu’elle a précédemment suivie; elle ne peut faire mieux dans la suite qu’autant que précédemment ses œuvres n’auraient pas été belles; si elles l’étaient déjà, elles doivent rester ce qu’elles sont. Si elles sont belles, c’est qu’elles sont conformes à leur cause : car même ici-bas un objet n’est beau que s’il possède tout ce qu’il doit posséder, c’est-à-dire, s’il possède la forme (eidos) qui lui est propre : car c’est la forme qui comprend tout ; c’est elle qui contient la matière, en ce sens qu’elle la façonne et qu’elle n’y laisse rien d’informe ; or il y aurait quelque chose d’informe s’il manquait à l’homme une partie, par exemple, un organe comme l’œil.

Ainsi, quand on assigne la cause d’une chose, on explique tout. Pourquoi dans l’homme des yeux, des sourcils? C’est pour qu’il possède tout ce qui est impliqué dans son essence. Dira-t-on que ces parties du corps lui sont données pour le garantir des dangers? Ce serait établir dans l’essence même un principe chargé de veiller sur l’essence. Les choses dont nous parlons sont impliquées dans l’essence qui existait avant elles. Par conséquent, l’essence renferme en elle-même la cause, qui, si elle est distincte de l’essence, en est cependant inséparable. Toutes les choses sont impliquées les unes dans les autres ; prises toutes ensemble, elles constituent l’Essence totale, parfaite, universelle; leur perfection est liée et inhérente à leur cause : ainsi l’essence d’un être (ousia), son caractère propre (sa quiddité, to ti en einai) et sa raison d’être (to dioti) ne font qu’un. Si donc avoir des sens, et des sens de telle sorte, est impliqué dans la forme de l’homme par la nécessité éternelle et par la perfection de l’Intelligence divine, qui, en vertu de sa perfection, renferme en soi les causes [aussi bien que les essences]; si c’est seulement a posteriori que nous remarquons que les choses sont bien réglées (car, dans le monde intelligible, la cause qui complète l’essence est intimement unie à l’essence : là-haut, l’homme n’est pas seulement intelligence, et la sensibilité ne lui a pas été ajoutée quand il est descendu dans la génération] ; s’il est ainsi, dis-je, nous avons à résoudre deux questions : Comment [si avoir des sens est impliqué dans la forme de l’homme] l’Intelligence n’incline-t-elle pas vers les choses d’ici-bas ? En quoi consistent ces sens [qu’on attribue à l’homme intelligible] ? — Dira-t-on que ces sens sont la puissance de percevoir les objets sensibles? Mais il serait absurde que là-haut l’homme possédât de toute éternité la puissance de sentir et qu’il ne sentît qu’ici bas, que cette puissance ne passât à l’acte que quand l’âme est devenue moins bonne [par son union au corps].