métis

MÉTIS (intelligence pratique, intelligence rusée)

[grec]

subs. fém.

Après avoir consommé son hymen avec Métis, Zeus épouse Thémis. Ces deux mariages lui permettent d’assurer sa suprématie comme nouveau roi des dieux, en s’associant deux divinités oraculaires dont le savoir embrasse la totalité du temps et qui entretiennent des rapports avec deux éléments cosmiques fondamentaux : la terre et l’eau. Enfantée par Gaia (la Terre), Thémis est la patronne des oracles de la terre : elle prononce des arrêts qui énoncent le futur, comme s’il existait déjà. Pour sa part Métis, la fille d’Okéanos et de Téthis, divinités maritimes, représente la divination par l’eau, qui envisage le futur sous son aspect aléatoire. Craignant que l’enfant auquel elle va donner naissance ne le renverse, Zeus avale Métis. Ainsi devient-il lui-même un dieu « à la métis », capable d’établir un ordre nouveau qui organise l’avenir ; et de cette curieuse union, naît Athéna, qui sera associée à Héphaistos comme divinité des arts (tekhnai). Le champ de la métis, extrêmement vaste, présente la plus grande variété, car il est celui de l’intelligence pratique, qui souvent se confond avec l’intelligence rusée : savoir-faire de l’artisan, habileté du sophiste, flair du politique, art du pilote dirigeant son navire, etc. Maintenue dans la plus grande ambiguïté par Platon qui décrit l’action du démiurge dans le Timée en utilisant des termes ressortissant à différents métiers, considérés comme des tâches inférieures dans son système social et politique, la métis trouve peut-être son aboutissement philosophique dans la phrônésis aristotélicienne. (L. Brisson.)