Porphyre de Tyr (233 305), dès qu’il eut fait la connaissance de Plotin à Rome, en 263, se consacra à répandre ses idées, à éditer ses œuvres en les faisant précéder d’une vie du maître (298), à écrire une Introduction aux intelligibles, où il utilise les Ennéades pour donner une vue d’ensemble de la nature de l’âme et du monde intelligible, insistant surtout sur l’impassibilité de l’âme, même dans la sensation (§ 18), et sur son indépendance du corps. Mais il semble que son goût personnel l’attirait vers l’ascétisme à nuance pythagoricienne et vers la théologie allégorique ; son traité De l’Abstinence des viandes, adressé à un certain Firmus, qui avait abandonné la pratique du végétarisme, contient, pour justifier cette pratique, des détails extraordinairement abondants et précieux (à cause des auteurs qu’ils nous font connaître, en particulier Théophraste, le successeur d’Aristote) sur les sacrifices sanglants ; ils ne plaisent qu’aux démons méchants qui veulent se faire adorer et qui corrompent les opinions, même des philosophes, sur les dieux. Sa Lettre à Marcella, une veuve mère de sept enfants qu’il épousa, est d’une dévotion toute traditionnelle, avec son dieu à l’Épictète, « témoin et surveillant de toutes nos actions et de toutes nos paroles ». C’est surtout la théologie pratique qui domine dans le traité sur la Philosophie d’après les Oracles, composé avant la rencontre avec Plotin et dont les extraits, connus par la Préparation évangélique d’Eusèbe, contiennent les données les plus curieuses sur les règles du culte, et celles de la fabrication des statues, règles données par les oracles. Le traité Des images, extrait aussi par Eusèbe, plus Stoïcien que Platonicien, donne de nombreux détails sur la signification symbolique des statues, aussi bien de la matière en laquelle elles sont faites que de leurs attitudes, de leurs couleurs, des attributs qu’on leur ajoute. L’explication d’un passage d’Homère, dans l’Antre des Nymphes, lui est une occasion d’exposer ses vues sur la destinée de l’âme. Enfin on le voit défendre, contre le néoplatonicien Atticus (fin du deuxième siècle), d’après qui la matière est une réalité indépendante du premier principe, la thèse plotinienne que cette hypostase dernière est, elle aussi, dérivée du principe. Tel est le théologien qui écrivit Contre les Chrétiens une attaque violente, dont Eusèbe a conservé quelques extraits où il proclame nettement que le culte de Jésus est incompatible avec celui d’Esculape.
Ajoutons que Porphyre fut aussi historien et commentateur ; auteur d’une Vie de Pythagore, il écrivit une Histoire des philosophes jusqu’à Platon, conservée par fragments, une Introduction aux Catégories d’Aristote (Isagoge) dont l’importance historique au Moyen âge est grande, un Commentaire des Catégories, conservé en partie, mais dont le commentaire de Boèce n’est que la traduction , une Introduction à l’apotélesmatique de Ptolémée, qui montre qu’il goûtait l’astrologie .