Singevin (1969:11-12) – Toda a filosofia do ser é uma filosofia do não-ser

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Toda a filosofia do ser é uma filosofia do não-ser; e o seu problema é sempre o de Platão, o seu problema chama-se sempre Parménides. O ser é o ser, dizia Parménides, o não-ser é o não-ser; desafio-vos, proíbo-vos de sair deste pensamento! E é verdade! Não se pode sair dele. Como é que alguma coisa pode ser colocada, como é que alguma coisa pode ser pensada, se não for o ser, mas se o ser é também apenas o ser, o único, o uno, que exclui de si toda a pluralidade, toda a mudança e toda a diferença, como é que alguma coisa pode ser colocada, como é que alguma coisa pode ser pensada, como é que alguma coisa pode ser discernida do ser e, consequentemente, discernida do não-ser? A este respeito, o Sofista, ou seja, o Lógico: “e se o ser e o não-ser, o Positivo e o Negativo, se Deus e o Diabo fossem uma e a mesma coisa, afinal, e se esta vasta Comédia que a existência encena perante o pensamento fosse apenas uma comédia, uma vasta e incomensurável ironia? Afinal, se o ser é ser, o não-ser não será também alguma coisa? É, muito precisamente, o não-ser! Ou deveríamos dizer que não é o não-ser? É, portanto, o ser…”. Na verdade, cuidado com o lógico; o diabo também é lógico, não sabias?

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Thulé extrême des longs désirs de l’esprit, la suprême Idée ne se répondra-t-elle que par le silence ? Cette simplicité la défend qu’elle a d’être unique et de ne se point souffrir, en conséquence, d’opposé. Point d’opposé, fût-ce un regard! La tentative de la connaissance échoue à se conclure, et donc à se finir, sur un ultime objet, son idole. C’est le drame même de la réflexion.

La philosophie est, avant tout, une prise de conscience de ce drame. De l’existence de toutes parts remontant à un principe de l’existence qui, parce qu’il en est le principe, est au-delà de l’existence, elle naît d’une présence à la fois et d’une absence et de souffrir également de ce qui est et de ce qui n’est pas. Comment poser, comment penser ce qui existe, si ce n’est à partir d’autre chose que ce qui existe ? Et qu’est-ce qui peut être autre chose que ce qui existe ? C’est ainsi que l’être, pour la pensée, n’est pas un fait; c’est une question, le fait d’une question. Mais faire de l’être une question dessine instantanément l’Idée ou le fantôme de quelque non-être.

Toute philosophie de l’être est une philosophie du non-être; et son problème est toujours celui de Platon, son problème s’appelle toujours Parménide. L’être est l’être, disait Parménide, le non-être est le non-être ; je te défie, je te défends de sortir de cette pensée ! Et il est vrai ! on n’en sort pas. Comment poser, comment penser quoi que ce soit, sinon l’être, mais que l’être aussi ne soit que l’être, l’unique, l’un, qui exclut de soi toute pluralité, tout changement, et toute différence, comment poser, comment penser, comment discerner de l’être quoi que ce soit, et le discerner, par conséquent, du non-être ? Là-dessus, le Sophiste, c’est-à-dire, en somme, le Logicien : « et si l’être et le non-être, le Positif et le Négatif, si Dieu et le diable n’étaient qu’une même chose, au fond, si cette vaste Comédie que l’existence joue devant la pensée n’était que comédie en effet, une vaste, une incommensurable ironie? Car enfin, si l’être est l’être, ne faut-il pas que le non-être soit lui aussi quelque chose ? Il est, très exactement, le non-être ! Ou faut-il dire qu’il n’est pas le non-être? Il est donc l’être…» En vérité, gardez-vous du logicien; le diable aussi est logicien, ne le saviez-vous pas ?

Or, est-ce le diable ou peut-être un dieu que Platon rencontre, lorsque s’interrogeant sur la valeur et davantage, sur la possibilité d’un Discours cohérent, d’un Discours logique, il s’aperçoit que ce Discours lui-même a besoin de se fonder, et dans quelque chose dont rien ne garantit à l’avance qu’il corresponde aux mouvements et aux articulations d’une parole intelligible ? Certes, le difficile, après tout, n’était pas de l’élever aux Idées; le commun langage y conduit. Et il aura suffi à Platon d’écouter parler le langage pour retrouver, d’un cri plus profond que toute mémoire, le vieux maître aimé que la ciguë ni les ans n’ont pu lui ravir, Socrate avec son pas d’hoplite et son front chauve, ses vives façons de Silène camus et la lenteur réticente de ses regards, Socrate déambulant à travers la Ville, curieux de tous et de tout, curieusement, ironiquement respectueux du Sophiste comme du Stratège, et toujours si merveilleusement prompt à empêtrer, de sa voix tranquille et de son sourire chargé de questions, ces badauds d’Athéniens qui admirent Aristide parce qu’il est juste et Alcibiade parce qu’il est beau, mais qu’est-ce que justice, dit Socrate, et qu’est-ce que beauté encore, dit Socrate ? Or, donc, me diras-tu, Hippias1, toi qui sais tout, ce que c’est que le beau? Le beau, Socrate, quoi de plus simple! Un beau cheval, ou, si tu préfères, ayant servi dans l’infanterie, une belle vierge ? — Et une cruche, Hippias, une belle cruche ? Ce n’est pas assez pour connaître que de simplement énumérer des exemples; connaître des choses belles, c’est d’abord connaître, c’est d’abord reconnaître qu’une même forme à toutes leur est présente que nous retrouvons dans le sensible pour, peut-être, l’avoir jadis contemplée face à face, dans un ciel intellectuel. Le sensible n’est que la figure de l’intelligible; et ce n’est pas autrement que l’esclave de Ménon se souviendra, dit Socrate encore, de la vérité! Mais voici que Parménide s’avance dans la maison de Pythodore, et Socrate lui-même se trouble; c’est que, cette fois, ce n’est pas le langage qui parle, mais le silence. Le grand silence de l’un sans mouvement et sans voix a figé sur la place la dispute sophistique. Car enfin, cette Idée, Socrate, dont tu parles, qui se divise, qui se partage entre des choses, d’où vient qu’elle puisse demeurer cependant une avec elle-même ?

Une, mais qu’est-ce que l’un ? Et ferons-nous, dit Parménide, que l’un soit ? Comment le dire ? L’un, s’il est être; ou l’un s’il est un ? C’est ici que tout commence ou recommence. Car il est bien sûr que rien ne commencerait si, à l’inverse, nous disions : être, si c’est un! Que tirer de l’un, sinon l’un ? Mais Parménide : et εἰ ἔν ἒστιν, ἔν εἰ ἒστιν, dans le tissu des mots, ce pli presque imperceptible; et c’est un monde.


  1. Hippias n’était pas athénien; il était d’Elis. On pensera qu’il importe assez peu sans doute. De même, on veut l’espérer, des arrangements que nous nous sommes amusé à faire du texte de Platon